Dans une assurance vie liée aux fonds de placement non garantie en cas de vie, la protection du capital ou du risque décès est coûteuse. Cela pénalise les résultats, sauf s’il s’agit d’un portefeuille obligataire dans le cadre du 3e pilier libre.

L’effondrement des marchés financiers en 2008 n’aura pas épargné les détenteurs d’assurances vie liées à des fonds de placement sans garantie en cas de vie: ils ont dû encaisser les pertes vertigineuses du ou des fonds sous-jacents exposés aux marchés des actions. Les plus touchés sont ceux qui ont choisi de s’engager au moyen d’une prime unique juste avant le krach, perdant d’un coup une grande partie de leur avoir. Mais, étant donné que ce type de produit est souscrit dans le cadre du 3e pilier, le contrat doit être conclu pour au moins dix ans: les assurés devraient donc a priori pouvoir bénéficier du prochain cycle haussier en restant investis sur une aussi longue période.

Cet espoir risque malheureusement de ne pas se concrétiser, car les assurés ignorent généralement que la valeur des parts de fonds accumulées en leur nom servent de couverture pour le risque décès, comme l’Ombudsman de l’assurance privée et de la Suva s’en est fait l’écho dans son dernier rapport annuel (2007): «Pour beaucoup, le réveil douloureux a été de constater que, lors de mauvaise cotation en bourse, des parts de fonds de certains produits étaient vendues pour couvrir le risque et les pertes en résultant ne pouvaient plus être rattrapées dans la période restant à couvrir.» Ainsi, rappelle l’Ombudsman, «contrairement à une simple opération boursière, la police couvrait aussi un risque qui a son prix». Prix qui vient s’ajouter aux frais de gestion des fonds sous-jacents.

Concrètement, la plupart des compagnies, comme on le voit dans le tableau ci-contre, prélèvent chaque année des parts de fonds de leurs assurés pour financer le risque décès, qui est généralement garanti. Ce coût sera d’autant plus élevé que l’assuré sera âgé et en mauvaise santé.

Le coût de cette garantie va évidemment se réduire en cas de marchés haussiers et s’accroître si la valeur des parts de fonds se met à fondre. Le phénomène peut être particulièrement dévastateur pour les primes uniques. En effet, l’assuré voit chuter la valeur de son investissement effectué d’un seul coup, tout en devant payer des primes décès croissantes, au fur et à mesure de la diminution progressive de son avoir. Ce mécanisme est amplifié pour les mauvais risques – à prime de risque décès élevée –, qui sont donc d’autant plus pénalisés par cette mécanique infernale.

Couverture du risque décès

Toutes les compagnies ne recourent cependant pas à ce système de couverture du risque décès. Notamment Swiss Life, qui avait défrayé la chronique au début des années 2000: un client, avec un mauvais risque (malade et âgé), avait souscrit une prime unique liée à des fonds de placement; mal conseillé, il avait rapidement perdu l’essentiel de son investissement en raison de la chute des marchés et des lourdes ponctions opérées au titre du risque décès.

Depuis, le géant de l’assurance a développé une nouvelle solution, ainsi que l’indique son porte-parole, Frank Keidel, pour son produit Vitality: «Au moment de l’établissement de la police, une réserve technique est constituée afin de couvrir les coûts prospectifs sur toute la durée du contrat (coûts du risque ainsi que frais de gestion du contrat). Pour le calcul de cette réserve, une baisse du cours de 60% est prise en considération. Les coûts sont prélevés de cette réserve tous les mois. La partie des coûts non utilisée (les fonds n’ont pas chuté de 60%) est rendue au client sous forme de parts de fonds.»

De son côté, AXA Winterthur recours à une autre technique pour sa nouvelle gamme de produits TwinStar, détaille son porte-parole Olivier Michel: «Pour éviter que la couverture décès coûte plus cher en cas de chute des fonds, nous avons introduit un nouveau mode de tarification: pourcentage fixe de la valeur des parts de fonds et non plus de la somme sous risque (la compagnie prend donc en charge le risque financier).» En d’autres termes, la compagnie réduit les primes risque décès de ses clients pour éviter d’accroître leurs pertes.

Quant à Generali, la compagnie prélève «un montant prédéfini sur le versement des primes périodiques au titre du risque décès, indique Liliane Scherer, porte-parole du groupe, tandis que, pour les primes uniques, il s’agit d’un prélèvement annuel, également dans une mesure prédéfinie».

Si ces approches alternatives ont l’avantage d’éviter les mauvaises surprises aux assurés, elles ne doivent pas faire oublier que cette sécurité accrue a son prix. Et qu’il va forcément se répercuter sur la performance finale des produits.

Assurance vie garantie en cas de vie

Pour échapper au danger de voir le coût de son risque décès exploser et pour protéger ses investissements des chutes des marchés, on peut s’intéresser aux produits protégeant le capital en cas de vie également, comme le proposent quelques compagnies. Le modèle qui domine est celui qui garantit la valeur maximale du fonds atteint avant l’échéance du contrat.

Pour parvenir à ce résultat, les entreprises recourent généralement à des fonds à cliquet, basé sur le concept du CPPI (Constant Proportion Portfolio Insurance). Ces fonds sont composés de produits à revenus fixes et variables, c’est-à-dire d’obligations et d’actions: le gérant accroît la part en actions en cas de hausse du marché, jusqu’à une certaine limite, et la réduit au profit des obligations lorsque le mouvement se renverse. Ce qui permet de sécuriser le capital, en comptant sur les revenus fixes à venir.

On pressent la limite du modèle: en cas de chute prolongée des bourses, le gérant doit liquider la totalité de son portefeuille actions, pour ne plus conserver que des titres à revenus fixes. C’est en fait exactement ce qui s’est passé avec le produit Capital Fund en plan d’investissement «Sécurité», avec garantie de la valeur maximale, de Zurich assurances, comme le reconnaît Sonja Giardini, sa porte-parole: «Le prestataire du fonds DWS Investment Suisse s’est vu contraindre de réduire la part en actions à zéro, au profit des obligations.» La compagnie a ainsi décidé de retirer ce plan d’investissement «Sécurité» de sa gamme de produits pour de nouveaux clients.

On peut imaginer que les assurés qui ont souscrit à ce produit au début de l’année 2008 apprécient qu’il soit parvenu à préserver le capital investi, selon le principe de la valeur maximale atteint par le fonds. Mais ils sont peut-être moins enchantés de se savoir condamnés à ce résultat jusqu’à l’échéance de leur contrat, quelle que soit l’évolution future du marché. Toutefois, précise la porte-parole, «ils peuvent profiter à nouveau, à long terme, d’une nouvelle évolution positive de la bourse en changeant de stratégie de placement – ce qui reste possible au sein de Capital Fund». Mais en renonçant du même coup à la garantie de la valeur maximale.

Autres types de garantie en cas de vie

Allianz offre deux solutions de garantie en cas de vie, déclare Guido Bürgin, responsable de la gestion des produits Vie individuelle: «Soit cette option est incluse contre le paiement d’une prime de garantie, soit la garantie est contenue dans le fonds. Dans le premier cas, la garantie dépend du produit, de la durée, de son montant, du fonds et de son cours actuel. Dans le second cas, les fonds comprennent de grandes parts dans des placements sûrs, tels que des obligations, afin de couvrir les garanties.»

Pour sa part, AXA Winterthur propose différentes variantes: d’une part, des fonds à cliquet, d’autre part, pour les produits TwinStar, comme le dit Olivier Michel, «nous avons mis en place un programme de hedging dynamique, qui nous permet en cas de perte (valeur des fonds inférieure à la garantie) de compenser par un gain au niveau de l’actif». Par hedging dynamique, on entend le recours à des produits dérivés.

Quant à Generali, explique Liliane Scherer, «à l’échéance du contrat, la compagnie garantit la somme en cas de vie conformément à la police. Un capital de réserve de garantie spécial est réservé sous forme d’actifs liés dans la société pour cette garantie. Ce capital est ainsi à l’abri des aléas conjoncturels.» Liliane Scherer précise que chez Generali, la part d’épargne est investie «dans le plan de placement choisi par le client, c’est-à-dire dans un portefeuille de fonds. Le client a également la possibilité de changer son plan de placement dans une certaine mesure tout en conservant la garantie.»

Enfin, Swisscanto propose une autre approche, avec son Swisscanto Life Invest Garant: ce produit offre une protection de la prime unique de 90 ou 100%, à choix. Comme le précise Roman Kappeler, son porte-parole, «cette garantie est assurée à l’échéance par des options. Les coûts sont fixés au début du contrat et ne changent plus pendant toute sa durée.»

Validité des garanties

«Il est important de souligner que les garanties offertes sous une forme ou une autre ne sont valables que jusqu’à la fin du contrat», avertit Albert Gallegos, responsable du département conseil patrimonial et prévoyance de la Banque Cantonale de Genève. «En général, toute dénonciation du contrat implique que la valeur de rachat sera calculée sur la valeur actuelle des parts du fonds et non plus, par exemple, sur la valeur maximale.» De même, les switches entre fonds, souvent possibles, gratuitement ou non, pour les assurances vie non garanties en cas de vie, vont faire tomber la garantie. Ou, au mieux, celle-ci ne sera à nouveau accordée qu’au bon vouloir de la compagnie.

Les rentes viagères liées à des fonds de placement

Peu de compagnies proposent des rentes viagères liées à des fonds de placement: Generali, Swiss Life et les Rentes genevoises. Fondamentalement, ces instruments couvrent un risque différent, celui de la longévité, donc à l’exclusion du risque décès ou d’invalidité. Les rentes ne sont donc pas pénalisées par ce risque en cas de chute de marchés.

Aux Rentes genevoises, le produit proposé garantit intégralement les primes versées à l’échéance. Contrairement à la plupart des assurances vie liée à des fonds, ce produit n’est pas «à proprement parler à base de fonds, explique Philippe Gaud, responsable des actifs, dans le sens où la compagnie joue son rôle d’assureur en prenant en charge le risque résiduel. Il n’y a donc pas de fonds à cliquet ou de couverture au moyen d’options. Le choix des fonds s’est porté sur des produits simples, en misant sur la durée: plus l’échéance est lointaine, plus la proportion en actions est élevée. Par exemple 25% pour un contrat de dix ans. Par la suite, cette proportion sera progressivement réduite à l’approche de l’échéance. Cette stratégie prudente permet au bénéficiaire d’éviter le risque de rester intégralement investi en obligations ou sur le marché monétaire pendant plusieurs années, comme c’est le cas avec les fonds à cliquet.»