Il est difficile à un néophyte d’estimer correctement un bien immobilier sans recourir aux services d’un professionnel. Mais il y a lieu de distinguer deux sortes d’expertises, comme nous l’explique Julien Blanc, secrétaire général de la Société des régisseurs de Genève: «La première est une expertise technique, qui vise à calculer le coût des travaux sur un immeuble; la seconde est une évaluation, et s’intéresse à la valeur effective du bien sur le marché.»

La première méthode est évidemment incontournable lorsqu’on doit entreprendre des rénovations importantes, soit pour son propre bien-être, mais aussi dans la perspective d’améliorer la valeur marchande de son bien. Ou lorsqu’on veut acquérir un immeuble et qu’on cherche à savoir quels seront les coûts engendrés par des travaux jugés indispensables. Pour ce type de prestation, on peut s’adresser aux associations d’architectes et d’ingénieurs.

Mais celui qui veut vendre ou acheter un bien immobilier aura besoin du second type d’expertise, qui lui donnera une évaluation marchande. C’est une prestation qui est notamment fournie par les membres de la Chambre suisse d’experts en estimations immobilières, section de l’Union suisse des professionnels de l’immobilier (USPI). Le prix d’une estimation pour une maison individuelle est compris entre 1500 et 2000 francs.

On peut obtenir une estimation pour un prix nettement plus bas, entre 290 et 340 francs, auprès du Centre d’information et de formation immobilières (CIFI). Cette société, établie à Zurich, propose, entre autres, une évaluation sur la base de la méthode dite hédoniste, totalement différente des deux autres techniques. Il s’agit d’une méthode d’évaluation statistique qui se base sur des transactions réelles. Ces dernières contribuent à déterminer le poids d’une cinquantaine de facteurs retenus comme ayant une influence sur le prix d’un objet immobilier. Il suffit de remplir un questionnaire de quelques pages pour obtenir cette estimation.

Selon Julien Blanc, «cette méthode marche assez bien pour des objets standards, sur lesquels ont lieu de nombreuses transactions, mais l’estimation s’écarte sensiblement de la valeur de marché pour des objets où manquent les points de comparaison. Par ailleurs, certains éléments du questionnaire aussi importants que la situation dans la commune, la qualité de la construction ou encore l’état du bâtiment sont difficiles à estimer par un non-professionnel. Sans parler du caractère subjectif des réponses liées à un bien aussi chargé d’affectivité que peut l’être son logement.» Pour les objets standards, et pour gagner du temps et un peu d’argent, Julien Blanc conseillerait de se faire aider par un professionnel pour répondre correctement aux questions du CIFI.

Christelle Bérard, responsable du CIFI pour la Suisse romande, admet les critiques portant sur les objets non standards, en précisant que la société avertit le client lorsque la fiabilité du modèle n’est plus assurée. De plus, ajoute-t-elle, «nous estimons que nos modèles expliquent environ 90% du prix d’un objet immobilier standard. Les 10% restants sont liés à des facteurs émotionnels qui ne sont pas modélisables. Par ailleurs, la contribution d’un expert en immobilier est toujours appréciée.»

Lorsqu’il s’agit d’un achat, le futur propriétaire bénéficiera de l’expertise de son prêteur. En effet, la banque n’accordera pas d’hypothèque allant au-delà de 80% de la valeur de son estimation. Si le prix demandé paraît nettement supérieur à ce dernier montant, la banque pourra refuser le prêt, ou demander à l’acquéreur potentiel d’augmenter sa part de fonds propres, comme le fait de temps en temps la Banque Cantonale de Genève. Andrew Gilbert, responsable pour le développement commercial dans la division grand public et réseau de la banque, indique que «ce phénomène est d’autant plus fréquent que, depuis une quinzaine de mois, nos estimations ont tendance à être inférieures aux prix du marché. Ce qui s’explique par la rareté de l’offre et le niveau historiquement bas des taux d’intérêt, qui perturbent le marché.»

Si vous désirez acheter une villa ou un appartement en PPE et que votre banque estime que le prix est trop élevé et vous demande plus de fonds propres, elle a donc peut-être raison. Mais n’hésitez pas à vous adresser à d’autres établissements, non seulement pour faire jouer la concurrence, mais aussi pour obtenir d’autres estimations. Si les évaluations convergent, c’est que l’objet de vos désirs est vraiment trop cher?