Les assurés peuvent procéder à des rachats supplémentaires pour compenser la baisse à venir des rentes causée par leur départ en retraite anticipée. Extrait du «Guide de votre prévoyance», qui vient d’être publié et peut être commandé sur «www.letemps.ch»

Les institutions de prévoyance peuvent permettre à leurs assurés qui auraient déjà comblé la totalité de leurs lacunes de prestations passées de se livrer à des rachats, entièrement déductibles de leur revenu imposable, pour couvrir le déficit à venir en cas de retraite anticipée. Ces dispositions ont souvent été introduites dans les règlements car elles ne coûtent rien à l’institution de prévoyance.

Pour illustrer notre propos, prenons l’exemple fourni par la Banque Cantonale de Genève (BCGE). Un assuré qui prendrait sa retraite à l’âge de 65 ans aurait accumulé un avoir de vieillesse de 830 000 francs. Au taux de conversion de 6,8%, il aurait alors droit à une rente annuelle de 56 440 franc (= 830 000 francs x 6,8%).

On suppose que, s’il part par anticipation à l’âge de 60 ans, son capital accumulé n’est plus que de 620 400 francs, converti au taux réduit de 6,01%. Sa rente de vieillesse ne s’élève alors plus qu’à 37 286 francs (= 620 400 francs x 6,01%), laissant un déficit de 19 154 francs (= 56 440 francs – 37 286 francs) par an jusqu’à la fin de ses jours, comme on le voit dans le graphique d’en haut, intitulé «Rentes de vieillesse anticipées».

Pour compenser ce trou à venir, l’assuré, qui a 55 ans, a la possibilité de procéder à des rachats. Pour qu’il obtienne une rente de 56 440 francs dès 60 ans et à vie, il faut tout d’abord calculer la somme nécessaire à épargner à 60 ans pour couvrir le capital manquant pour la période allant de ses 60 à ses 65 ans. On applique une simple règle de trois, en divisant les rentes annuelles par le taux de conversion à 60 ans, pour obtenir le capital nécessaire, soit 939 101 francs (= 56 440 francs/6,01%). Le complément de capital nécessaire à 60 ans résulte ainsi de la différence entre le montant nécessaire à 60 ans et celui qui est effectivement accumulé à cet âge, soit 318 701 francs (= 939 101 francs – 620 400 francs).

Etant donné que le rachat a lieu 5 ans avant la retraite anticipée, l’assuré bénéficiera des intérêts sur cette période. Intérêts qu’on suppose être de 2%. Le montant effectif de son rachat pour obtenir des rentes équivalentes à son départ à l’âge réglementaire sera ainsi réduit des intérêts qui vont s’empiler sur son compte au cours de ces cinq années. Comme il s’agit d’intérêts composés sur cinq ans, on obtient le complément à verser à 55 ans en divisant le capital additionnel nécessaire à 60 ans par (1,02) 5, soit 288 657 francs (= 318 701 francs/(1,02)5).

Comme on le voit sur le graphique d’en bas, titré «Rentes de vieillesse anticipées avec rachat complémentaire», cet apport permet d’atteindre le même niveau de rentes qu’avec un départ à l’âge réglementaire.

Finalement, si la personne a racheté l’intégralité de ses prestations à l’âge de 60 ans et qu’elle décide quand même de poursuivre son activité au-delà, il ne pourra y avoir enrichissement ou double déduction des cotisations. La loi a donc imposé une limite: si l’assuré ne prend finalement pas sa retraite par anticipation et qu’il a fait des rachats dans ce but-là, les prestations versées ne pourront pas excéder 105% de l’objectif réglementaire fixé par la caisse de pension.

Pour rester sur l’exemple proposé par la BCGE, on suppose que l’assuré a procédé à un rachat de 288 657 francs à 55 ans dans l’idée de prendre une retraite anticipée à 60 ans avec la même rente de 56 440 francs. Cependant, il poursuit son activité jusqu’à 65 ans, avec un compte d’épargne affichant 1 182 000 francs (calcul BCGE). Avec un taux de conversion de 6,8%, il aurait théoriquement droit à une rente de 80 376 francs (= 6,8 % x 1 182 000 francs).

Mais ce montant va largement dépasser les 105% autorisés, qui s’élèvent à 59 262 francs (= 56 440 francs x 105%). Il faudra donc, en cas de poursuite de l’activité après la retraite anticipée prévue, cesser de prélever des cotisations, voire, dans les cas extrêmes, réduire la rente de retraite. Cette limitation pourrait donc pénaliser celui ou celle qui préparerait longtemps à l’avance sa retraite anticipée par ce biais, mais qui déciderait au bout du compte de prolonger sa vie active jusqu’à l’âge officiel.

Pour éviter ce problème, les caisses de pension limitent le rachat de prestations réglementaires à 105% de manière à ce que, si l’employé continue à travailler jusqu’à la retraite, ses cotisations supplémentaires ne soient pas perdues. En revanche, lorsque la personne décide de manière irrévocable de partir en retraite, elle peut alors racheter tout ou partie de ses années de cotisations nécessaires pour bénéficier de rentes égales à celles qu’elle aurait reçues en travaillant jusqu’à l’âge réglementaire. Attention toutefois à la restriction concernant la prise du capital lorsque des rachats sont effectués dans les trois ans précédant le départ en retraite.

Pour les personnes qui veulent réduire leur taux d’activité professionnelle à partir de 58 ans (avec une diminution de salaire de 50% au maximum), les institutions peuvent les aider à combler la lacune à venir en leur donnant la possibilité de maintenir leur salaire assuré au même niveau que précédemment. Elles pourront donc cotiser les mêmes montants et bénéficier automatiquement des mêmes déductions fiscales que lorsqu’elles étaient employées à plein temps. Il faut toutefois préciser que la diminution de salaire rendra évidemment plus difficile le financement de ce complément de prévoyance, qui sera d’autant plus élevé que la contribution patronale sera limitée à la cotisation portant sur le salaire effectif. A moins que l’employeur n’en décide autrement. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les déductions fiscales sur des revenus inférieurs auront généralement moins d’impact, puisque le taux marginal d’imposition sera moins élevé qu’avec un salaire complet.

Cet article est le dernier d’une série consacrée à la prévoyance.