Pour un investisseur, le choix des véhicules doit s’effectuer sur la base de sa stratégie d’allocation d’actifs à long terme et sur le principe du retour vers la moyenne de la performance des gérants.

De nombreuses études ont été menées pour savoir si une gestion purement indicielle sur les marchés des actions s’avérait finalement plus performante que la moyenne des résultats des fonds de placement gérés activement. Contrairement à une idée reçue, le débat est encore ouvert, comme le montrerait une récente étude américaine (Cremers 2011) selon laquelle les fonds gérés de la manière la plus active battraient leur indice de référence, même après déduction des frais.

Pourtant, si de telles recherches sont essentielles pour les promoteurs de fonds qui se disputent le marché, elles négligent un facteur crucial, affirme le professeur Thorsten Hens, de l’Université de Zurich et spécialiste de finance comportementale. En effet, dans son étude «Behavioural Finance and Mutual Fund Flows: An International Study», publiée en août dernier, il explique comment les investisseurs vont eux-mêmes se livrer à une gestion active de leur portefeuille de fonds. Les détenteurs de parts vont ainsi réagir selon leur aversion à la perte et à leur degré d’impatience vis-à-vis de l’évolution des marchés.

De cette manière, les investisseurs ne conservent souvent que peu de temps leurs parts, pour en racheter d’autres selon l’évolution des bourses. En d’autres termes, ils essaient de limiter leurs pertes sur les marchés en recul, en vendant, tout en rentrant sur ceux qui semblent les plus prometteurs. Mais cette gestion est rarement couronnée de succès, car ils quittent souvent trop tard des marchés baissiers, donc près de leur bas, et achètent lorsque les marchés haussiers s’approchent de leur sommet. Autrement dit, ils vendent bon marché et achètent cher! Concrètement, comme le montre une autre étude (Dalbar) effectuée de 1993 à 2012 sur le marché américain des fonds de placement en actions, le va-et-vient des investisseurs leur coûterait une sous-performance de plus de 4 points de pourcentage par rapport à l’indice S&P 500!

Au vu de ces différentes études, l’investisseur individuel, sans aptitude particulière, doit retenir la leçon suivante: le market timing est à proscrire, que ce soit sur des fonds gérés activement ou des produits indiciels. En revanche, on peut se poser la question concernant le choix du fonds activement géré dans une catégorie particulière. Dans ce cas, dans une démarche raisonnable, l’investisseur détermine le marché sur lequel il veut se positionner selon sa stratégie d’allocation d’actifs. Mais, à moins de choisir un fonds indiciel, il va évidemment chercher à sélectionner le produit capable de battre le marché. Autrement dit de générer de l’alpha. Il devrait donc choisir le fonds qui affiche la meilleure performance, ajustée au risque, sur une période suffisamment longue pour qu’elle soit significative.

Le problème, c’est que l’année suivante, le premier du classement ne le sera sans doute plus, car dans le domaine des fonds classiques, c’est-à-dire ceux qui n’appartiennent pas au monde de la gestion alternative, les résultats montrent relativement peu de récurrences d’une période à l’autre. Pour évaluer la capacité d’un gestionnaire à reproduire ses performances passées, il faudrait pouvoir identifier les facteurs qui en sont à l’origine. Et même si l’on y parvient, ces facteurs sont susceptibles de changements. Il est donc absurde de procéder à des permutations régulières de fonds pour sauter dans celui qui vient d’afficher la meilleure performance. D’autant plus que cela entraîne de coûteuses commissions d’émission qui viennent grever la performance à chaque changement.

Paradoxalement, ces classements s’avèrent tout de même utiles si on les regarde en creux. En effet, on observe au fil du temps un phénomène de retour vers la moyenne: les fonds qui produisent des résultats moyens présentent une probabilité plus élevée de monter dans le classement que ceux qui affichent des résultats exceptionnels. Ce mouvement de balancier peut paraître magique, mais s’explique facilement: la surperformance temporaire de la grande majorité des fonds n’est due, sur le court ou moyen terme, qu’à la chance. Et la chance ne dure pas éternellement. Pour tirer parti de ce phénomène, il s’agit donc d’éviter de choisir les produits en tête des classements actuels pour privilégier ceux qui se sont moins bien comportés au cours de la dernière période sous revue. Ou alors de prendre directement des produits indiciels.

Même si l’on est peu familier des arcanes des fonds de placement, on peut aussi utilement recourir à un autre critère: le TER, pour Total Expense Ratio, c’est-à-dire le rapport des frais indirects qui vont être prélevés par le fonds par rapport à sa fortune nette, avant la publication de sa performance. C’est un facteur qui est souvent âprement discuté. En effet, un gérant démontrant un grand talent pourrait justifier d’un TER élevé, car ce qui compte finalement c’est la performance nette dégagée par le fonds. Mais, là encore, si ses performances passées doivent plus à la chance qu’à une vraie compétence, et donc qu’il faut s’attendre à un retour vers la moyenne de ses résultats, il vaut mieux l’écarter. Car ses frais, eux, ne vont pas revenir à la moyenne!