L’effondrement de hedge funds investis dans les CDO dans les hypothèques «subprime» aux Etats-Unis illustre une nouvelle fois la faiblesse du ratio de Sharpe pour évaluer le risque de ce type de produit. Car ce ratio, qui permet de mesurer la qualité d’une performance par rapport au risque pris, s’avère dans ce cas totalement inadapté. On comprend pourquoi lorsqu’on examine sa construction: on prend la performance d’un fonds sur une période donnée, puis on en soustrait le taux d’un placement sans risque. Enfin, on divise ce résultat par la volatilité du fonds. Plus le résultat est élevé, plus la performance est excédentaire par rapport au taux hors risque, qui peut être celui du taux monétaire ou des emprunts d’Etat à long terme.

Le problème vient de la mesure de la volatilité. Dans le cas de hedge funds investis en CDO, la volatilité se base sur les mouvements de prix d’actifs qui ne sont pas confrontés au marché. Elle sera donc très basse, permettant mécaniquement de présenter un ratio de Sharpe élevé. Mais lorsque des turbulences se produisent sur le marché et qu’il faut vendre les actifs en catastrophe, la réalité des prix va s’imposer…

Loi normale

D’une manière plus technique, la faiblesse du ratio de Sharpe pour mesurer la performance ajustée au risque des hedge funds vient de l’une des hypothèses qui en limitent la portée: la distribution des rentabilités des fonds doit suivre une loi normale, c’est-à-dire qu’elle doit dessiner une belle courbe de Gauss, parfaitement symétrique. Or si c’est généralement le cas pour les fonds traditionnels, il en va tout autrement avec les hedge funds.

Concrètement, la distribution des rentabilités de ces véhicules de placement est asymétrique. C’est ce qu’on appelle, dans le jargon statistique, une «skewness». Cette dernière est dite négative lorsque les rendements inférieurs sont plus fréquents que si la distribution suivait une loi normale, et positive dans le cas contraire. En outre, les distributions des hedge funds tendent également à être le théâtre d’événements extrêmes. En d’autres termes, par rapport à la courbe de Gauss normale, les extrémités de la courbe des rentabilités des hedge funds – les queues de distribution – sont plus épaisses. Un hedge fund à la skewness très négative et à la kurtosis très positive – donc très dangereux – pourra donc présenter un ratio de Sharpe très élevé, avec une volatilité très basse.

Le ratio oméga

Heureusement, depuis quelques années, comme l’explique Jérôme Haag, de la société FinLab, qui fournit un logiciel pour sélectionner les fonds de placement et les hedge funds, un nouveau ratio est apparu, le ratio oméga, qui parvient à prendre en compte la skewness et la kurtosis des fonds alternatifs. Cette nouvelle mesure de performance ajustée du risque, très à la mode aujourd’hui, divise les rendements en deux parties relativement à un seuil fixé par l’investisseur. Les «bons» rendements sont au-dessus de ce seuil et les «mauvais» sont en dessous. Le ratio oméga est le rapport des rendements supérieurs et inférieurs au seuil pondérés par leurs probabilités. Plus la valeur de l’oméga est élevée, meilleur est le ratio.