Fonds ’06: La grande manifestation zurichoise confirme l’offre consistante venant des sites suisses de trading grand public. A bas prix mais sans assistance. PME Magazine s’y est plongé.
La neuvième édition de la Fondsmesse, les trois premiers jours du mois de février à Zurich, confirme le succès d’une manifestation qui a enregistré une fréquentation de plus de 10000 visiteurs l’an dernier, et qui accueille près de cent exposants cette année (95% du marché des fonds en Suisse étant représentés).
Elle confirme également l’importance de l’offre de fonds en ligne sur les principaux sites d’e-trading grand public. Une manière de réduire les frais pour celles et ceux qui consentent à se passer de conseil.
L’éventail des frais de courtage pour acheter une part de fonds de placement peut varier de 0,5 à 5%, selon le canal de distribution qu’un investisseur choisira! Mais pas pour le même service. Cependant, le prix le plus bas peut se révéler de loin le meilleur choix: tout dépendra de son profil personnel, de ses connaissances en matière de placement et du temps qu’il a envie de consacrer à la gestion de son compte.
En effet, celui ou celle qui veut acquérir des parts de fonds de placement passera généralement par sa banque, qui lui prodiguera sans doute quelques conseils et recommandations pour intégrer ce produit dans son portefeuille selon une saine répartition des risques. Mais ce service n’est évidemment pas gratuit et se paie par des commissions d’émission (prélevées par les distributeurs) s’élevant généralement à 2% pour des fonds en actions, voire même jusqu’à 5 ou 6%.
Ceux qui peuvent se passer des conseils des professionnels profitent des prix cassés proposés par les deux seuls sites de courtage en ligne en Suisse qui offrent une large gamme de fonds de placement, soit e-sider.com, qui fait partie du groupe BCV, et Swissquote.ch.
Swissquote, véritable banque en ligne, occupe une position dominante, grâce à son offre de plus de 4000 fonds (de droit suisse et étranger) contre seulement 1100 sur e-sider.com. Yann Pittier, CEO d’e-sider.com précise néanmoins: «Hormis ces 1100 fonds, quelque 5000 autres fonds peuvent être achetés par téléphone, aux mêmes conditions de courtage que ceux traités en ligne.»
La différence de courtage par rapport aux banques traditionnelles est surtout notable pour les fonds en actions. Par exemple, Swissquote fait payer 0,5% de la valeur de la part, avec un minimum de 5 et un maximum de 250 francs.
e-sider.com facture 21francs de commission pour un ordre de 3000 francs, 25 francs jusqu’à 5000 francs, 35 francs jusqu’à 10000 francs, etc. Au-delà de 75000 francs, les frais se limitent à 190 francs.
Cependant chez Swissquote les frais sont plus élevés pour un certain nombre de fonds pour lesquels la société n’a pas encore signé d’accord de distribution. Sur ces fonds, Swissquote charge 50 francs de frais de correspondant (à l’achat uniquement). Mais au fur et à mesure qu’elle signera de nouveaux accords de distribution, ces frais supplémentaires disparaîtront. Quant à la vente des fonds, elle est nette de frais tant chez Swissquote que chez e-sider.com.
Expérience. S’il est très facile de passer des ordres d’achat ou de vente en quelques clics de souris, l’absence de conseils sous-entend tout de même que l’acheteur sache composer son portefeuille en fonction de son profil de risque, puis qu’il soit capable de choisir la bonne combinaison de fonds. Ces aptitudes n’étant pas innées, le client doit consacrer un peu de temps et d’énergie pour progressivement acquérir cette connaissance et ensuite franchir le pas de gérer soi-même son patrimoine en ligne.
L’autre grand avantage de passer par un courtier en ligne, c’est d’éviter le conflit d’intérêts inhérent aux distributeurs quand ils sont également émetteurs de fonds. Les banques ont toujours une certaine réticence à proposer les produits de la concurrence. Exemple, on ne trouve sur UBS Fund Gate que les fonds de la banque, à l’exclusion de tout autre. Dans cette perspective, Swissquote bénéficie d’un véritable avantage, du fait qu’il ne vend aucun produit maison.
Un client d’une banque traditionnelle se verra rarement proposer les meilleurs fonds sur le marché, mais plutôt ceux de la société qui gérera son patrimoine, comme s’en fait l’écho Paul Coudret, auteur de divers ouvrages de vulgarisation financière et qui vient de publier un ouvrage sur la bonne manière d’investir son argent sur les marchés financiers (voir A noter), cosigné par Nils Tuchschmid.
Ouvrage qui contribuera sans aucun doute à la (bonne) éducation des investisseurs. L’auteur recommande ainsi à ceux qui sont suffisamment à l’aise avec les arcanes de la gestion de fortune de passer par un courtier en ligne pour acheter leurs fonds de placement.
Paul Coudret relève que même pour ceux qui ne veulent pas renoncer aux conseils de leur gérant, il y a toujours la possibilité de faire acheter un fonds de placement de la concurrence, sauf s’ils ont confié un mandat discrétionnaire. «Il ne faut pas oublier, explique-t-il, qu’un fonds de placement est un papier-valeur: un client peut donc donner un ordre d’achat, exactement comme pour une action.»
Quant aux autres canaux de distribution, par exemple des courtiers indépendants, notre auteur se montre très circonspect sur la qualité du conseil et le manque éventuel de fiabilité, même si ces distributeurs sont dûment autorisés par la Commission fédérale des banques. Sans compter les taux de commission pouvant atteindre 5%!
Frais. Paul Coudret recommande également au néophyte de s’abstenir d’acquérir des fonds qui ne publient pas de TER. Cet acronyme, pour Total Expense Ratio, indique le pourcentage de frais qui va être prélevé sur la fortune du fonds pour couvrir la plus grande partie des dépenses qui vont lui être imputées, à commencer par la commission de gestion. A performance égale, et pour un même risque, il est conseillé de choisir le fonds avec le TER le moins élevé.
Ce point est d’autant plus important à examiner que le TER mesure et intègre les coûts variables, qui vont se répéter chaque année, contrairement à la commission d’émission ou courtage, qui n’interviendra qu’à l’achat.
Malheureusement, la publication de ce chiffre n’a pas force obligatoire, mais repose sur une directive de la Swiss Funds Association du 13 juin 2003.
Ce chiffre, quand il existe, n’est ainsi pas visible sur les sites en ligne. En revanche, on peut obtenir ces informations sur le site de la Bourse suisse sous www.swx.com/marktet/funds/tif/overview. Paul Coudret recommande aux investisseurs en ligne de choisir leurs fonds sur la base des critères suivants: la performance sur trois et cinq ans, la volatilité, le volume et la date de création.
Recherches. Celui qui choisit Swissquote pour acheter des parts de fonds de placement va bénéficier d’outils d’analyse quantitative de qualité professionnelle, capables de fournir sous une forme synthétique des sélections de fonds selon divers critères et l’accès aux informations légales sur les produits et les émetteurs. Ces critères de sélection sont la société de gestion, la devise, la domiciliation du fonds ou encore le montant des frais de gestion.
De même, l’investisseur peut rechercher les fonds selon leurs performances (depuis le 1er janvier de l’année courante, sur un mois, trois mois, un an et trois ans), leur notation et leur risque(notation Morningstar), l’écart-type (indiquant la volatilité du fonds) et le ratio de Sharpe. Ce dernier donne une indication sur le rapport entre la performance et la volatilité du fonds: plus ce ratio est élevé, meilleur est le fonds. Enfin, une dernière sélection peut s’opérer sur la base du contenu du portefeuille selon la taille des capitalisations, le secteur et la région d’investissement.
Pour justifier les choix de ces critères, Marc Bürki remarque qu’«on s’est rendu compte que certains investisseurs qui achètent des fonds commencent leur recherche par un secteur préféré. Ils affinent ensuite le choix par la performance en demandant qu’elle soit supérieure à 3% sur les quatre dernières années. Dans la liste qu’ils obtiennent ils analysent l’émetteur, en préférant, à performance égale, telle société à telle autre. Alors qu’un autre type d’investisseurs va d’abord s’intéresser à l’émetteur et le choisir en raison de son approche, de la qualité de sa documentation, du fait qu’il publie son TER (certains le font avec beaucoup de sérieux). Sur cette base, il choisit alors le secteur qui lui convient.»
Chez e-sider.com, on constate que les fonctionnalités de recherche sur les fonds de placement sont plus modestes. Comme nous l’indique Yann Pittier, le moteur de recherche proposé ne prend en compte que quatre catégories, à savoir la classe d’actifs, la région et le thème ainsi que le promoteur du fonds. Ce n’est qu’après avoir sélectionné un produit que les investisseurs pourront obtenir d’autres informations, notamment sur leurs performances, avec des liens vers les sites des promoteurs. Tout cela à condition d’être client d’e-sider.com, contrairement au site de Swissquote, dont la recherche d’informations est librement accessible.
PROFIL. Quelle est la clientèle qui utilise ces services? «Une bonne partie des transactions de fonds de placement sur le site 8% des ordres exécutés est le fait de gérants de fortune indépendants, dont les fonds sous gestion représentent 12% de notre clientèle», indique Marc Bürki.
Swissquote compte aussi sur les transactions d’une nouvelle clientèle: «Il y a quatre ans, les clients étaient très actifs et achetaient principalement des produits dérivés sur le marché suisse. L’élargissement de notre palette de marchés et de produits combiné avec des résultats financiers bénéficiaires, a attiré des clients qui ont une stratégie d’investissement dans laquelle figurent les fonds de placement aux côtés d’autres types d’investissement, dans une perspective d’épargne, avec des dépôts qui dépassent largement le million. Dans ce cas, ils ont certainement des fonds de placement dans leur portefeuille.»
Que font les autres sites?
A côté de Swissquote et de e-sider.com, les autres courtiers en ligne ne traitent de fonds de placement que s’ils sont cotés en Bourse, comme les fonds immobiliers ou les ETF, (Exchange traded funds) nouvelle catégorie de fonds indiciels purs traités en Bourse. Seulement, ces deux catégories de produits ne recouvrent qu’une infime partie des fonds de placement proposés sur le marché suisse. Pour être complet, on notera que Trade-Net, le site de courtage de la Banque Cantonale de Berne, propose tout de même les fonds Swisscanto, mais à l’exclusion de tout autre. Quant à Yellowtrade, le site de Postfinance, il se limite aux fonds cotés. Enfin, les derniers arrivés sur le marché du courtage en ligne, soit la banque Synthesis et Tradejet, se sont positionnés dans des niches et n’offrent pas de possibilités de transactions de fonds de placement.
«Commission» mode d’emploi
Si le monde des fonds de placement ne brille pas par la transparence en matière de coûts ou d’appellation des produits, leur compréhension est en outre embrouillée par un usage indistinct du terme de commission d’émission. En effet, formellement, comme l’explique Marc Bürki, «la commission d’émission, appelée frontload, est une commission percue par la société qui gère le fonds. Cette commission est justifiée par le coût supposé de l’accueil d’un nouvel investisseur, qui se ferait au détriment de la performance du fonds. Mais ce type de frais ne concerne qu’une partie infime de l’ensemble des fonds.»
En fait, dans la grande majorité, les frais baptisés commissions d’émission couvrent les coûts de transaction du distributeur. C’est d’ailleurs sous l’intitulé de frais de courtage qu’ils figurent sur les sites d’e-sider.com et de Swissquote. C’est ce qui explique aussi pourquoi il est possible que le Credit Suisse vende un des propres fonds avec une commission dite d’émission de 2% et que ce même produit soit souscrit avec une commission maximale de 0,5% sur Swissquote par exemple!
Par ailleurs, il est important de noter que la différence de courtages proposés par les sites en ligne est nettement moins spectaculaire par rapport aux banques traditionnelles si l’on considère non seulement les produits en actions, mais également les fonds obligataires ou monétaires. Car les établissements bancaires proposent des tarifs moins élevés pour ces deux dernières catégories de produits. Par exemple, si Credit Suisse demande 2% pour les fonds en actions, ce taux tombe à 1% pour les fonds en obligations et dans une fourchette comprise entre 0,5 et 0% pour les fonds monétaires (une commission minimale de 50 francs est toutefois exigée). A noter que Swissquote propose certains fonds monétaires avec 0% de frais de courtage.