Depuis quelques mois, le PTR apparaît de plus en plus fréquemment dans la documentation des promoteurs de fonds en Suisse.

Sous ce nouvel acronyme se cache le terme de Portfolio Turnover Rate qui, comme son nom l’indique, mesure l’ampleur des transactions opérées au sein du fonds par rapport à sa fortune moyenne. La publication de ce chiffre répond à la directive du 25 janvier 2006 de l’Association suisse des fonds de placement (SFA) qui en précise les modalités. Comme l’indique Matthäus Den Otter, directeur de la SFA, «la publication de ce nouveau ratio se concrétisera dans les prospectus simplifiés des différents promoteurs au fur et à mesure de leur adaptation, pour se généraliser à partir de 2007.»

Une lacune à combler

Formellement, le PTR est défini comme le rapport entre, d’une part, la somme du volume des achats et de ventes de titres, à laquelle on soustrait la somme des émissions et des rachats de parts de fonds et, d’autre part, la fortune moyenne nette du fonds. Pour être concret, prenons l’exemple fourni par la banque Wegelin: on suppose qu’un fonds a entièrement renouvelé son portefeuille sur une période semestrielle, c’est-à-dire que toutes les positions auraient été vendues pour être remplacées par d’autres valeurs – ou les mêmes. En supposant également que le fonds n’a émis ou racheté aucune part de fonds durant cette période, on obtient immédiatement un PTR de 200%.

Frais de courtage inclus

Le PTR vient d’une certaine manière combler la lacune du TER. En effet, le Total Expense Ratio n’est pas aussi complet que son nom semble l’indiquer: s’il prend en compte l’ensemble des frais indirects prélevés sur la fortune du fonds, soit principalement la commission de gestion, il néglige en revanche les frais liés aux achats ou ventes de titres, essentiellement les frais de courtage. A noter que le PTR, par définition, ne peut servir à déterminer le coût effectif de ces transactions. Mais la mesure de l’ampleur des mouvements à l’intérieur du portefeuille va indirectement fournir une indication sur ces coûts.

On peut évidemment se poser la question de l’intérêt de ce nouveau ratio. Car les performances publiées de tous les fonds sont toujours nettes des frais indirects, y compris les frais de transactions. Il est vrai qu’aux Etats-Unis, le PTR est considéré comme un indicateur important, comme le rappelle un commentaire de recherche de l’Investment Company Institute (http://www.ici.org), car les gains en capital réalisés sont en effet soumis à impôt. Ainsi un tournus rapide du portefeuille entraînera non seulement des frais de courtage supplémentaires, mais également des impôts plus élevés. Mais en Suisse, comme chacun sait, il n’y a pas d’impôts sur les gains en capital. Alors à quoi sert vraiment le PTR?

A cette question, Matthäus Den Otter répond que le PTR «donne une indication sur les transactions effectuées par le gérant du fonds, permettant d’évaluer si elles sont plus ou moins en ligne avec la stratégie qui est publiée dans le prospectus. Et donc si l’activité de trading paraît justifiée avec le but de placement.»

Du côté des professionnels, on retrouve le même sentiment, comme s’en fait l’écho Cyrille Urfer, sélectionneur de fonds auprès de LODH: «Le PTR permet de valider un certain nombre d’éléments sur les fonds que nous sélectionnons, mais il ne constitue pas un critère déterminant. Car, en principe, toutes nos analyses sont basées sur la valeur nette d’inventaire, c’est-à-dire que les frais sont déjà déduits. De même, le TER doit également être considéré comme un instrument de validation en particulier pour des produits indicés ou semi-indicés, pour les investisseurs institutionnels».

Interprétations du TER

Pour des produits gérés activement, l’utilisation du TER donne lieu à des interprétations divergentes. Ainsi, entre deux fonds à performance égale, mais à TER inégaux, Alfredo Piacentini, associé de la Banque Syz & Co, indique qu’il sélectionnerait le fonds au TER le plus élevé, «car cela veut dire que le gérant du premier fonds est meilleur que l’autre. Je choisirais donc le fonds le plus performant.»

Alors que Cyrille Urfer tend plutôt à considérer que le gérant dont le fonds affiche un TER le plus élevé des deux part avec un handicap, «handicap qui peut devenir très conséquent avec le temps». Ces points de vue opposés mettent en lumière les limites de ce type d’indicateurs, surtout pour des investisseurs individuels.

Heureusement, l’investisseur peut tout de même agir rationnellement dans le domaine des frais directs, qui couvrent les commissions d’émission, de rachat et les droits de garde. En effet, les commissions d’émission et de rachat, vont dépendre des canaux de distribution, car ils servent essentiellement à rémunérer les intermédiaires, tandis que les droits de garde sont prélevés par la banque auprès de laquelle le compte est ouvert.

Les meilleures conditions pour acquérir des parts avec une très large palette sont proposées par la banque en ligne Swissquote et par e-sider.com, de la BCV. Mais évidemment sans conseils personnalisés. A noter que ceux qui veulent bénéficier de tels conseils et qui recourent aux services d’établissements bancaires eux-mêmes promoteurs de fonds risquent d’être victime d’un biais commercial.

En effet, comme l’avait d’ailleurs montré une enquête parue récemment dans ces colonnes, les établissements bancaires ne présentent en général que leurs propres produits à leur clientèle peu fortunée et imposent souvent des frais plus élevés pour l’acquisition des parts de fonds externes, à la grande exception de Credit Suisse.