Les rachats sont moins bon marché qu’auparavant mais restent très sûrs malgré les mesures d’assainissement à venir

Naguère, le rachat de lacunes de cotisation dans les caisses publiques et donc avec garantie de l’Etat constituait une excellente affaire pour tout assuré pouvant améliorer sa prévoyance professionnelle par ce biais. Non seulement en raison de la déduction fiscale intégrale sur le revenu, mais aussi parce qu’il coûtait généralement très peu, comme l’explique Marc Baijot, actuaire auprès de LPP Gestion. Ce dernier rappelle que ces institutions appliquent en général des plans en primauté de prestations, c’est-à-dire que la rente est en principe calculée sur le dernier salaire de l’assuré avant qu’il ne prenne sa retraite, par exemple 60%. Mais la faiblesse des taux de couverture de certaines de ces caisses publiques va les obliger à s’assainir, pour passer parfois d’un taux de 50% actuellement à 80% au cours des quarante prochaines années.

Dans cette perspective, le taux de rente que l’assuré accroît de cette manière ne va-t-il pas être pénalisé par des mesures d’assainissement à venir? «Pas pour le passé! répond Marc Baijot, car ces taux de rente rachetés sont acquis à l’assuré. En revanche, les rachats vont s’avérer plus chers à l’avenir, mais il ne s’agit là que d’un réajustement au juste prix. Le coût des rachats ayant été trop bas pendant trop longtemps par le passé.» La question est de savoir si cette hausse ne va pas réduire par trop l’intérêt du rachat. Pour l’évaluer, explique encore Marc Baijot, il faudrait le comparer à ce qu’offrirait un assureur privé: «Pour le même prix, vous n’obtiendrez certainement pas la même rente. En d’autres termes, c’est toujours avantageux, mais moins qu’auparavant.»

On ne peut cependant s’arrêter là. En effet, que se passerait-il en cas de liquidation partielle, c’est-à-dire par exemple si au moins 10% du personnel quittait l’entreprise dans un court laps de temps. A ce moment-là, les partants ne recevraient pas le 100% de leur avoir de prévoyance, mais un montant correspondant au prorata du taux de couverture de la caisse. Concrètement, les employés licenciés en masse et assurés auprès d’une caisse de pension qui afficherait un taux de 90%, perdraient non seulement leur emploi mais également 10% de leur avoir de libre passage! D’où le danger de procéder à des rachats lorsque son employeur traverse une période difficile.

Mais une caisse de pension publique n’est-elle pas complètement à l’abri d’une liquidation partielle? Non, comme le précise l’article 19 de la LFLP. Si l’on écarte des privatisations massives du secteur public, ce n’est en effet pas impossible, comme l’explique Christian Rey, expert en assurances de pension auprès de la société Allea: «Dans les caisses de pensions de droit public, d’autres institutions leur sont parfois affiliées, qui peuvent être de droit public ou privé.» Une caisse affiliée peut cependant quitter l’institution de droit public pour choisir une autre solution, soit une assurance collective, soit une autre caisse de pension. Si elle est en sous-couverture et que l’employeur restructure son activité, entraînant un grand nombre de pertes d’emploi, la caisse affiliée pourrait alors se trouver en situation de liquidation partielle. Mais, en principe, la sous-couverture est financée par l’employeur. Par ailleurs, ce même article 19 de la LFLP protège plus encore l’assuré d’une caisse publique, y compris les institutions affiliées, contre les conséquences d’une éventuelle liquidation partielle comme l’affirme encore Christian Rey: «Le taux de couverture servant de référence en cas de liquidation partielle est celui d’un taux initial que toutes les institutions de prévoyance de droit public doivent déterminer jusqu’à la fin de cette année. Ce taux de couverture peut par exemple s’élever à 60%. En cas de liquidation partielle, il faudrait que le taux tombe en dessous de ce taux initial pour que les assurés quittant la caisse ne puissent emporter le 100% de leur avoir de libre passage. Le risque est d’autant plus faible que les caisses publiques sont justement en train d’être assainies dans la perspective d’augmenter substantiellement leur taux de couverture.» Moralité: les assurés peuvent continuer à procéder à des rachats en toute sérénité.