Deuxième pilier ou troisième pilier lié? Tout dépend du profil de l’indépendant et de ses besoins. Chaque solution a ses avantages et ses inconvénients. On peut facilement les mettre en évidence, sans prétention d’exhaustivité
Celui qui devient indépendant n’est pas obligé de s’affilier à une institution de prévoyance. Souvent, ceux qui ne disposent pas de gros revenus privilégient plutôt des produits de troisième pilier lié, en renonçant complètement au deuxième pilier. Mais, avant d’aller plus loin, il faut préciser que la comparaison n’a véritablement de sens qu’entre une affiliation à une caisse de pension et la souscription à une assurance vie dans le cadre de la prévoyance liée. En effet, l’autre forme de troisième pilier lié, le compte de prévoyance, n’offre pas de couverture pour les risques décès et invalidité. On peut toutefois compléter un compte de prévoyance par une ou plusieurs assurances risque pur.
Les avantages fiscaux du deuxième pilier par rapport au troisième pilier lié
Pour les indépendants à hauts revenus, l’adhésion à une caisse de pension constitue une véritable aubaine fiscale. En effet, le salaire AVS assurable dans un plan de prévoyance surobligatoire peut s’élever jusqu’à dix fois celui du salaire AVS maximal LPP (régime obligatoire), qui est de 83 520 francs en 2012, soit 835 200 francs. Sur ce montant, les cotisations au deuxième pilier peuvent aller jusqu’à 25%, soit 208 800 francs par an (= 25% x CHF 835 200), entièrement déductibles de leur revenu imposable.
Toutefois, dans la réalité, les plans de prévoyance prévoient plutôt des cotisations maximales de 20% car la loi limite la somme des prestations de vieillesse du 2e pilier et de l’AVS à 85% du salaire ou revenu AVS assurable perçu avant la retraite. Or ce plafond risquerait d’être dépassé avec des cotisations à 25%.
Deuxième pilier et troisième pilier lié
Mais, même à 20% de cotisations, la déduction fiscale réalisée grâce au deuxième pilier serait déjà plus élevée pour un revenu de 200 000 francs déclaré à l’AVS, par exemple, qu’avec un troisième pilier lié. En effet, si le souscripteur de produits de la prévoyance liée peut déduire ses cotisations jusqu’à 20% de son revenu imposable, leur montant est limité à 33 408 francs par an (s’il n’est pas affilié par ailleurs à une institution de prévoyance).
Mais l’affiliation à une caisse de pension est encore plus avantageuse pour l’indépendant. En effet, il aurait en outre le droit, à l’instar de toute personne active, de souscrire à un ou plusieurs produits de troisième pilier lié, en bénéficiant du même montant de déductions fiscales, soit 6682 francs par an. Et il pourrait encore profiter de la possibilité de procéder à des rachats sur la base du salaire assuré maximal, donc jusqu’à 835 200 francs. Fiscalement, l’indépendant serait alors gagnant sur tous les tableaux: il profiterait immédiatement d’une forte réduction d’impôt, qui pourrait être accrue en cas de rachat. Alors qu’il n’y a aucune possibilité de rachats dans le troisième pilier lié.
Enfin, au chapitre des déductions fiscales, l’indépendant pourrait encore déduire de son revenu soumis à l’AVS la moitié de la cotisation qu’il verse au titre du deuxième pilier. C’est d’autant plus intéressant que l’AVS est sans doute l’assurance sociale la plus redistributive. Tout montant qui dépasse 83 520 francs (en 2012) n’est pas constitutif de prestations pour l’assuré. Toute déduction constitue donc un pur bénéfice.
Les prestations comparées du deuxième pilier et du troisième pilier lié
Les différences entre le deuxième pilier et les produits de troisième pilier lié ne s’arrêtent pas à la fiscalité, loin de là, comme on le voit dans le tableau récapitulatif. Ainsi, les caisses de pension doivent offrir le choix entre le capital – au minimum un quart, mais seulement pour la partie obligatoire – et les rentes, tandis que les produits de troisième pilier lié proposent l’un ou l’autre, de manière exclusive, voire une combinaison des deux.
Par ailleurs, les assurés d’une caisse de pension bénéficient d’un tarif de risque collectif, qui n’est pas forcément plus avantageux que le tarif individuel appliqué dans le troisième pilier lié. Selon le secteur, les primes sont plus ou moins élevées en ce qui concerne les risques décès et invalidité.
En termes de rémunération, le deuxième pilier bénéficie d’un taux d’intérêt minimal, fixé par le Conseil fédéral à 1,5% depuis le 1er janvier 2012, tandis que les produits d’assurance vie du troisième pilier lié le sont au taux technique garanti, dont le maximum a été établi par la Finma à 1,5% également en début d’année.
Les taux de conversion sont également distincts: ils sont clairement en faveur du deuxième pilier pour la partie obligatoire, puisque largement déterminé par des facteurs politiques. Toutefois, si l’on considère la partie surobligatoire, le taux de conversion peut être nettement inférieur comme c’est le cas chez les fondations collectives d’assurance vie, au point de faire pencher la balance en faveur du troisième pilier libre dans certains cas. Par ailleurs, les comparaisons n’ont pas forcément de sens puisque les rentes servies par le deuxième pilier sont sans restitution de primes, alors que cette possibilité existe (mais rarement en troisième pilier lié, il est vrai) pour les rentes viagères privées.
Parmi les autres différences, on mentionnera encore la possibilité de transférer un troisième pilier lié vers le deuxième pilier, alors que l’inverse est impossible. Enfin, en matière d’accession à la propriété, les deux solutions permettent de retirer les fonds propres nécessaires, maisl’amortissement ne vaut généralement la peine que par le biais d’un produit de troisième pilier lié.
Cet article est le deuxième d’une série consacrée à la prévoyance. Prochain épisode le 4 juin, consacré à l’explication des avantages et des risques d’un retrait du deuxième pilier pour financer un achat immobilier