Parmi les moyens les plus efficaces pour diminuer ses impôts figurent le rachat d’années dans sa caisse de pension et la souscription de produits de 3e pilier lié.

Les cotisations au 2e pilier constituent une source importante d’économies fiscales puisqu’elles sont entièrement déductibles du revenu imposable. Mais la grande majorité des employés le sait déjà, puisque l’affiliation à la caisse de pension de leur entreprise est obligatoire dès que le salaire annuel dépasse 21 330 fr. par an. Dans cette perspective, on pourrait ne s’intéresser qu’aux indépendants, qui seuls disposent de la liberté pour s’affilier ou non à la caisse de pension de leur choix. Mais ce serait aller vite en besogne !

En fait, dans certaines situations, les salariés peuvent aussi prendre leur destin en main pour améliorer leur prévoyance vieillesse. C’est le cas lorsque l’assuré accuse des lacunes dans sa caisse de pension, c’est-à-dire qu’il n’a pas cotisé suffisamment pour avoir droit aux rentes de vieillesse maximales prévues par son plan de prévoyance. Il pourrait ainsi procéder à des versements volontaires, qu’on appelle rachats, pour combler ce trou. Ce type d’opération s’avère particulièrement judicieux, puisque les montants sont également déductibles. Mais les rachats nécessitent une analyse de l’état de santé de sa caisse de pension et de son optimisation fiscale personnelle, comme on le verra plus loin de manière détaillée.

Dans un autre cas de figure, les assurés qui auraient cotisé au maximum de leur plan de prévoyance pourraient quand même agir pour accroître leur couverture. Mais il faudrait que la caisse de pension propose différents plans de prévoyance et que l’assuré ait la possibilité d’opter pour un plan plus ambitieux, qui assure plus largement son salaire effectif. Il devra alors acquitter des cotisations plus élevées, mais en bénéficiant des déductions fiscales qui les accompagnent, à l’instar des cotisations ordinaires, tout en profitant de celles de son employeur.

L’autre grande source d’économies fiscales sur une base volontaire, c’est la souscription de produits de 3e pilier lié. Cette forme de prévoyance individuelle bénéficie en effet d’avantages fiscaux – au prix d’une série de contraintes – qui diffèrent selon qu’on est affilié ou non à une caisse de pension.

Commençons par examiner la situation des personnes obligatoirement assurées dans le cadre de la prévoyance professionnelle, avant de se pencher sur le cas des indépendants. Cette distinction est d’autant plus justifiée que ces derniers bénéficient d’une plus grande liberté, nécessitant la mise en place d’une véritable stratégie.

Comment procéder à des rachats dans sa caisse de pension ?

Si l’on dispose des fonds nécessaires pour procéder à un rachat, il faut toutefois s’assurer de l’état de santé de sa caisse de pension, soit principalement son taux de couverture, son taux technique et la structure démographique de ses affiliés. Par exemple, si la caisse doit prendre des mesures d’assainissement en raison d’un découvert trop élevé, il peut être judicieux de reporter ses rachats. Mais il faut également prendre en compte sa situation personnelle et son profil de risque, dans une perspective de planification financière. Ainsi, pour tirer pleinement profit de rachats en termes fiscaux, il faut, si possible, éviter de les effectuer en une seule fois, mais plutôt les échelonner sur plusieurs années. Cette démarche s’explique par la progressivité de l’impôt : les déductions fiscales sont particulièrement avantageuses pour les tranches de revenu les plus hautes.

Pour être concret, prenons le cas d’un couple marié, sans enfants, habitant Genève, dégageant un revenu imposable de 150 000 fr. par an, tant au niveau fédéral que cantonal. S’il procédait à un rachat de 100 000 fr. en une fois, il économiserait 30 813 fr. d’impôts, comme nous l’indique le calculateur de Logismata, accessible sur le site de la Banque Migros. Alors qu’en étalant ses rachats sur cinq ans, à raison de 20 000 fr. par an, ce couple épargnerait annuellement près de 7430 fr., soit un total de 37 150 francs. Son économie fiscale supplémentaire serait donc de 6337 fr. (voir graphique 2 ci-contre).

Les économies fiscales nettes du 3e pilier lié

Les versements au titre du 3e pilier lié constituent également un gisement d’économies fiscales puisque les cotisations sont déductibles du revenu imposable. On rappellera qu’il s’agit de produits tels qu’un compte de prévoyance lié à une fondation bancaire ou une police de prévoyance conclue avec une compagnie d’assurances.

Pour les produits d’assurance, ce sont des assurances vie risque pur ou mixtes, ou, plus rarement des rentes viagères. Ils se distinguent des produits de 3e pilier libre par leurs contraintes, dont le blocage jusqu’à cinq ans avant l’âge légal de la retraite. Il faut souligner que le montant des déductions dépend de l’affiliation ou non à une institution de prévoyance. Ainsi, les salariés peuvent déduire jusqu’à 6826 fr. par an sur leur revenu imposable, alors que les indépendants sans caisse de pension bénéficient d’une déduction allant jusqu’à 20% de leurs gains, mais au maximum 34 128 fr. par an.

Les économies qui leur sont associées constituent un véritable cadeau du fisc. Mais elles ne sont pas absolues. En effet, le retrait du capital à l’échéance va être imposé, à un taux réduit cependant, identique à celui qui est dû lors de prise de tout ou partie de l’avoir de vieillesse dans sa caisse de pension. Au bout du compte, l’économie fiscale nette reste en principe substantielle. On peut facilement la mesurer grâce à un autre calculateur de Logismata, disponible sur le site de la Banque Migros, comme on l’a fait dans l’exemple suivant.

Prenons le cas d’un homme de 35 ans, marié, domicilié à Lausanne, avec un revenu imposable cantonal de 100 000 fr. Celui-ci souscrit à un produit de 3e pilier lié bancaire, au taux de 0,5%, sur trente ans, puisqu’il compte prendre sa retraite à 65 ans. Il verse la cotisation annuelle maximale de 6826 fr., qui lui permettra d’accumuler 204 780 fr. à l’échéance, auxquels s’ajouteront 16 665 fr. d’intérêts composés. Il pourra ainsi économiser 1852 fr. chaque année sur ses impôts, soit 55 560 fr. au total. En déduisant l’impôt unique à l’échéance sur le capital accumulé, qui est de 19 500 fr., on obtient l’économie fiscale nette, soit 36 060 fr. (voir graphique 3 page précédente).

Malgré cet avantage fiscal, il est possible que la souscription d’une assurance mixte à prime périodique en 3e pilier libre procure encore plus d’économies fiscales, mais seulement à Genève, et sous conditions. En effet, si les prestations de telles assurances à l’échéance du contrat sont toujours exonérées, les cotisations le sont également dans ce canton, comme à Fribourg, mais pour des montants inférieurs.

Comment optimiser les économies fiscales du 3e pilier lié

Cette économie s’avère importante, mais peut encore être augmentée : il suffit d’échelonner la prise du capital accumulé sur plusieurs années, de manière à réduire l’impôt total qui sera dû. On retrouve le mécanisme qui permet de casser la progressivité de l’impôt. Mais on ne peut fractionner le versement du capital d’un produit de 3e pilier lié. On contourne cependant facilement cet écueil, en souscrivant plusieurs produits de ce type. On peut donc les résilier sur différents exercices, les uns après les autres. Il faut toutefois prendre garde à la pratique fiscale de chaque canton, car l’étalement du retrait de produits de 3e pilier lié pourrait être considéré comme de l’évasion fiscale : l’intégralité de cette épargne serait alors imposée comme s’il s’agissait d’un versement unique.

Ce principe est également valable pour les retraits de ses avoirs de 2e pilier, qui vont s’additionner au capital retiré de produits de 3e pilier lié. Pour réduire l’impôt, il faut donc les répartir sur plusieurs années. Prenons un exemple pour illustrer notre propos, en s’appuyant toujours sur le calculateur de Logismata. Un couple est domicilié à Lausanne. Le mari part en retraite en 2023. Il va prélever 500 000 fr. de sa caisse de pension. Son épouse, qui cesse de travailler en 2021, va retirer 200 000 fr. de la sienne. Par ailleurs, elle avait souscrit un produit de 3e pilier lié pour 40 000 fr. et son mari pour 60 000 fr., qu’ils vont recevoir respectivement en 2020 et 2022. Sur ce total de 800 000 fr., ils vont payer 78 561 fr. d’impôts. S’ils avaient retiré le même montant, mais en une seule fois, en 2020 par exemple, ils auraient dû régler un impôt de 101 191 fr., soit 22 630 fr. de plus (voir graphique 4 page précédente).

Cette stratégie ne posera pas de problèmes pratiques pour les produits de 3e pilier lié, puisqu’on peut facilement les anticiper ou les retarder tant qu’on est en activité. Pour le 2e pilier, il suffira que les conjoints évitent de partir en retraite la même année s’ils comptent retirer tout ou partie de leur avoir de vieillesse respectif.

La stratégie fiscale de l’indépendant

Comme on l’a dit, l’indépendant qui renonce au 2e pilier bénéficie de déductions fiscales sensiblement plus généreuses dans le 3e pilier lié que celui qui est entré dans une caisse de pension. Ce point est important, mais d’autres critères doivent entrer en ligne de compte pour faire ses choix. Ainsi, pour une famille, l’affiliation à une institution de prévoyance s’avère souvent la meilleure solution pour couvrir le risque décès et d’invalidité : les primes sont en principe plus basses qu’avec des assurances vie, en raison de tarifs collectifs. Mais, pour un célibataire sans enfants, les primes pour veuve et orphelins sont payées à fonds perdu. La solution pourrait donc passer par des produits de 3e pilier lié, avec ses avantages fiscaux, ou libre.

Quel que soit son choix, on rappellera que l’indépendant devra compléter sa protection par des assurances d’indemnités journalières en cas de maladie et d’accident, car les rentes de l’AI ne seront versées qu’au bout de 720 jours : les indemnités journalières viendront donc combler la disparition du revenu jusqu’à ce que les rentes d’invalidité prennent le relais.

Pour les indépendants aux revenus élevés, l’affiliation à une caisse de pension apparaît en revanche incontournable, et ce quelle que soit leur situation familiale. En effet, la prévoyance professionnelle permet de cotiser théoriquement jusqu’à 25 % de ses revenus, avec une limite maximale de 853 200 fr. par an. Ce qui implique une déduction fiscale maximale de 213 300 fr. (soit 25% de 853 200), contre seulement 34 128 fr. au maximum dans le 3e pilier lié.

Concrètement, cela signifie que dès 150 000 fr. de revenu annuel, les déductions fiscales dans le 2e pilier vont dépasser le maximum du 3e pilier lié pour les personnes sans caisse de pension, à 37 500 fr. (soit 25% de 150 000). Avec 200 000 fr. de revenu, cette déduction peut donc monter jusqu’à 50 000 fr. par an.

Par ailleurs, l’indépendant pourrait encore souscrire à un ou plusieurs produits de 3e pilier lié, en bénéficiant d’une déduction de 6826 fr. supplémentaires. Ces déductions se monteraient donc à 56 826 fr., contre seulement 34 128 fr. dans le 3e pilier lié pour une personne sans caisse de pension (voir graphique 5 page 35). En réalité, le potentiel d’économies fiscales s’avère plus considérable encore pour l’affilié à une caisse de pension, puisqu’il pourra procéder à des rachats, tout aussi déductibles.

Comment choisir sa caisse de pension

Pour trouver la caisse de pension de ses rêves, on recherchera évidemment une institution de prévoyance solide et pérenne, comme lorsqu’on veut procéder à un rachat. Mais la démarche est un peu différente puisqu’on choisit un partenaire dont l’offre doit répondre à ses besoins spécifiques. Parmi les critères fréquemment évoqués par les professionnels figurent le nombre de plans de prévoyance proposés, la flexibilité pour en changer et la souplesse pour procéder aux rachats. Pour ceux qui s’approchent de la retraite, le taux de conversion peut constituer un facteur important.

Un indépendant peut entrer dans la caisse de pension de l’association professionnelle à laquelle il est rattaché, ou une institution de prévoyance comme la CIEPP, qui est une fondation commune ouverte aux indépendants de tout horizon. Celui qui emploie du personnel pourrait également s’affilier à la caisse de pension de ses employés. Mais ce n’est pas forcément une très bonne idée, car il devra entrer dans le même plan qu’eux, sans pouvoir l’adapter à sa situation personnelle et à ses désirs. Il pourrait également adhérer à l’institution supplétive, mais seulement en dernier recours, car cette dernière n’offre que la prévoyance obligatoire, le minimum LPP.

Plusieurs calculateurs en libre accès permettent de mesurer les économies fiscales éventuelles.

En chiffres: comment améliorer sa prévoyance vieillesse

  1. Il faut se renseigner sur l’état de santé de sa caisse de pension

Lorsque les actifs d’une caisse de pension dépassent ses passifs – signe de bonne santé -, cela se traduit par un taux de couverture de supérieur à 100%, qui est ici de 125%.

  1. Mieux vaut des rachats étalés de son 2e pilier plutôt qu’en une seule fois

Un rachat unique de 100 000 francs à genève permettrait d’économiser 30’813 francs contre 37’150 en l’étalant sur cinq ans, soit un gain fiscal supplémentaire de 6’337 francs.

  1. Souscrire un produit de 3e pilier lié est interessant

Exemple à Lausanne : pour 100 000 francs de revenu, l’économie fiscale maximale autorisée sur trente ans s’élève à 55 560 francs, moins 19 500 d’impôts lors du retrait. L’impôt net se monte donc à 36 060 francs.

  1. Étalier ses retraits de produits de prévoyance

En retirant simultanément l’avoir de vieillesse de leur caisse de pension et de leur 3e pilier lié pour un montant de 800 000 francs, un couple à Lausanne paierait 101 191 francs d’impôt, contre 78 651 francs en l’étalant sur quatre ans.

  1. Indépendants: S’affilier à une caisse de pension?

Cotisations maximales pour un indépendant avec 200 000 francs de revenus annuels : il pourrait déduire jusqu’à 34 128 francs avec un 3e pilier lié, mais jusqu’à 56 826 francs s’il s’affilie également à une caisse de pension.

En chiffres

6826 fr.

Ce sont les déductions maximales par année dans le 3e pilier lié si l’on est affilié à une caisse de pension.

34 128 fr.

Ce sont les déductions maximales par année dans le 3e pilier lié si l’on n’est pas affilié à une caisse de pension. Elles peuvent monter jusqu’à 20% de ses gains.

60 435 fr.

C’est le salaire annuel coordonné maximal pour la prévoyance obligatoire (LPP).

853 200 fr.

C’est le salaire annuel assuré maximal pour la prévoyance surobligatoire.

213 300 fr.

C’est le montant maximal des cotisations déductibles pour la prévoyance surobligatoire.

GLOSSAIRE
Assurance mixte

Cette catégorie d’assurance vie combine une prestation d’assurance et d’épargne. Elle peut prendre la forme d’une assurance à prime périodique ou à prime unique.

Institution supplétive

Institution de prévoyance créée par la Confédération et qui a essentiellement pour tâche d’affilier d’office les employeurs qui ne se conforment pas à la LPP, ainsi que ceux qui en font la demande.

Plan de prévoyance

Ensemble des dispositions contenues dans le règlement de prévoyance, portant principalement sur le cercle des personnes assurées, les dispositions relatives au salaire, au financement et aux prestations de prévoyance.

Salaire assuré (ou coordonné)

Partie du salaire sur laquelle les bonifications de vieillesse vont être calculées pour constituer, avec le rendement des capitaux, l’avoir de vieillesse.

Taux de couverture

Rapport entre les actifs nets et les engagements de prévoyance présents et futurs, ainsi que les provisions techniques.

Taux technique (2e pilier)

Le taux technique représente le taux de rendement annuel moyen futur que l’institution de prévoyance pense pouvoir réaliser avec une marge de sécurité.

Taux de conversion

Dans le cadre du 2e pilier, c’est le taux calculé sur l’avoir de vieillesse accumulé par l’assuré, déterminant sa rente annuelle en cas d’invalidité, de décès et pour la vieillesse.

Prêts? Calculez

On trouve actuellement plusieurs calculateurs en libre accès qui permettent de mesurer les économies fiscales autorisées dans le cadre de la prévoyance. Parmi les plus performants figurent ceux de Logismata, que proposent différents établissements, dont la Banque Migros et Retraites Populaires : www.migrosbank.ch/fr/personne-privee/ prévoyance/calculateur www.retraitespopulaires.ch/contactaide/ calculateurs

Pour des recherches plus complètes, un grand nombre de liens sont disponibles sur le site pierrenovello.ch.