La tempête provoquée par la crise des caisses de pension en 2002 n’est heureusement pas restée sans conséquences législatives. En effet, dès le 1er avril prochain entrera en vigueur la première partie de la révision de la LPP. Ce premier paquet de mesures vise à regagner la confiance des assurés, en améliorant la transparence. Parmi ces mesures figure notamment l’obligation pour les assureurs privés de tenir une comptabilité séparée pour les fondations collectives. Cette mesure, comme le précise l’OFAS, permettra de clairement séparer les avoirs de la prévoyance professionnelle des autres comptes d’assurance. Ce qui n’était pas le cas jusqu’ici, rendant les contrôles très difficiles, voire impossibles. En outre, les assureurs devront informer la fondation collective qui sera en mesure de renseigner les assurés sur des questions telles que le calcul de primes, la participation aux excédents et les prestations.

Cette amélioration de la transparence est d’autant plus nécessaire que la situation financière des institutions de prévoyance est loin d’être idyllique, même si elle est beaucoup moins sombre qu’on ne pouvait le penser à la publication d’une enquête en juin 2003. Ce sondage, effectué sur une base facultative, montrait que 45% des caisses de pension étaient en sous-couverture. Or les résultats de l’enquête de l’OFAS, publiée en décembre 2003, pour l’ensemble des institutions de prévoyance et des assureurs vie au 31 décembre 2002 indiquaient que ce taux n’était que de 20%. A priori, on peut imaginer qu’avec la remontée des marchés boursiers en 2003, un certain nombre d’institutions ont pu bénéficier de ce ballon d’oxygène, même si la majeure partie de leurs placements est à revenus fixes.

Mais rien n’est jamais acquis, et les marchés peuvent très bien connaître une nouvelle descente aux enfers, demain ou dans cinq ans. C’est pourquoi tous les assurés auraient grandement avantage à tirer profit de ce vent d’ouverture pour faire le point régulièrement sur l’état de santé de leur institution de prévoyance.

Tout d’abord, il s’agit de savoir quel est le taux de couverture de sa caisse de pension, comme nous le rappelle Marc Baijot, actuaire de Coninco SA et auteur d’un remarquable petit ouvrage baptisé Le 2e Pilier sans tabou (Coninco, 2004). Mais ce critère est loin d’être suffisant. Il faut également tenir compte du cash-flow. Comme le 2e pilier n’est obligatoire que depuis 1985, beaucoup de caisses n’ont encore que peu de rentes à verser, contrairement à des institutions de prévoyance plus anciennes, comme celle de Nestlé ou de l’Etat.

Si une institution de prévoyance est en découvert technique, cela ne signifie donc pas que ses prestations seront diminuées. Mais un déficit de couverture est synonyme de vulnérabilité. Par exemple, une entreprise peut connaître des difficultés et être obligée de licencier plus de 10% de son personnel. Dans ce cas, explique Marc Baijot, la caisse devra faire face à une grande sortie de prestations de libre passage, demande à laquelle elle serait peut-être incapable de répondre. Elle pourrait alors demander à l’autorité de surveillance d’être mise en liquidation partielle, c’est-à-dire qu’elle pourrait diminuer le montant des capitaux à verser à ses futurs ex-employés, tout en augmentant simultanément les cotisations des salariés restants. En cas de doute sur l’état de son institution de prévoyance, chaque assuré peut toujours demander des informations à l’autorité de surveillance, indique encore Marc Baijot.

Les cas de liquidations partielles sont heureusement rares. Mais les caisses en déficit de couverture doivent être assainies. Par exemple, explique Marc Baijot, le conseil de fondation pourrait décider, avec la bénédiction de l’autorité de surveillance, de ne verser aucun intérêt (0%) sur les comptes des assurés pendant cinq ans; ou de maintenir le taux d’intérêt minimal, tout en demandant tant à l’employeur qu’aux salariés de verser 2% de cotisations supplémentaires.

Dans ce cas particulier, et si vous aviez la possibilité de faire des rachats, il vaudrait mieux que le conseil de fondation choisisse la deuxième solution. Sinon, votre apport volontaire serait aussi rémunéré à 0% pendant cinq ans? Il faudrait peut-être attendre que l’assainissement soit achevé ou se tourner vers un produit du 3e pilier lié.