Prendre au moins un quart de son avoir de 2e pilier arrivé à l’âge de la retraite est possible depuis le 1er janvier de l’an dernier, en lieu et place des rentes correspondantes. En fait, la plupart des caisses autorisaient déjà le retrait total du capital pour les assurés arrivant à l’âge de la retraite. Mais, est-ce vraiment une bonne idée? Car ces fonds servent a priori à couvrir des besoins de prévoyance, du moins pour la majorité des assurés, qui ne bénéficieront pas d’autres sources de revenus que des rentes de vieillesse de l’AVS. Il s’agit donc de faire fructifier ce capital de manière à ce qu’il permette de dégager les revenus nécessaires sur une longue durée jusqu’au terme de son existence.

L’idée peut être d’engager ces fonds sur les marchés des actions dans l’espoir que le rendement à long terme de ce type d’actifs est suffisamment élevé pour couvrir non seulement ses besoins, mais éventuellement de laisser un capital en héritage. Mais, cela suppose, comme c’est toujours le cas avec la gestion de fortune, d’avoir une surface financière suffisamment large pour résister aux soubresauts des marchés financiers. Or ceux-ci peuvent s’avérer dévastateurs pour les investisseurs qui doivent retirer des fonds au mauvais moment, pour faire face à leurs échéances courantes. Le risque étant à ce moment-là de consommer la totalité de son portefeuille rapidement et de survivre très longtemps, mais avec très peu de ressources. Alors que les rentes du 2e pilier couvriront ce risque de longévité jusqu’au décès de l’assuré et de celui de son conjoint (à hauteur de 60% pour le survivant).

En fait, la règle de base est que «si l’on dispose d’un avoir de vieillesse relativement modeste, soit moins de 500000 francs, il vaut mieux conserver ses rentes dans le 2e pilier», comme le conseille le responsable du marché auprès des Rentes Genevoises Fabrice Geinoz. Mais le retrait d’une partie de son capital peut avoir du sens pour ceux qui disposent de moyens supérieurs, que notre interlocuteur estime «de 2 à 3 millions de francs, maison comprise. Surtout si l’assuré tient à laisser une partie de cet avoir accumulé à ses enfants et que la caisse de pension ne prévoit pas de restitution de l’avoir de vieillesse aux héritiers.»

Ces prestations supplémentaires ont évidemment un coût. La rente est donc sans aucun doute à privilégier. Mais les rentes viagères du 3e pilier ne sont pas aussi généreuses que celles qui sont offertes sur la partie obligatoire du 2e pilier. On rappellera que les taux de conversion sont actuellement de 7,1% pour les hommes et de 7,15% pour les femmes. En comparaison, les taux de conversion proposés par les assureurs privés arrivent péniblement dans une fourchette comprise entre 4 et 4,5%. La différence est suffisamment grande pour laisser sagement la partie obligatoire de son 2e pilier au sein de sa caisse de pension.

En revanche, il en va différemment pour la partie surobligatoire. Car si certaines caisses offrent des taux aussi élevés sur l’ensemble de l’avoir de vieillesse de leurs assurés, de nombreuses institutions de prévoyance proposent des taux nettement inférieurs pour la partie surobligatoire. En effet, les taux de conversion se situent alors entre 5 et 5,5%.

Dans ce cas, le transfert de cet avoir surobligatoire peut se justifier, surtout si l’on tient compte de l’avantage fiscal qui penche en faveur des rentes viagères libres: ces dernières ne sont en effet imposées qu’à hauteur de 40%, alors que celles qui sont issues du 2e pilier le sont à 100%. «Nous allons tenir compte dans nos calculs de tous les aspects économiques et de la prévoyance pour évaluer la pertinence de cette opération, explique encore Fabrice Geinoz. Si c’est le cas, l’idée sera par exemple de sortir la partie surobligatoire du 2e pilier pour la transformer en rente viagère garantie, en laissant la partie obligatoire dans la caisse de pension.»

L’avantage d’une telle solution sera de permettre à l’assuré de mieux répartir ses risques par rapport aux difficultés à venir de notre système de prévoyance vieillesse, en s’appuyant sur les trois piliers, plutôt que de se reposer uniquement sur les deux premiers.