Le médecin indépendant peut s’affilier ou non à une institution de prévoyance. C’est une décision généralement très pertinente, mais qui nécessite réflexion.

L’adhésion à une caisse de pension constitue sans doute l’une des meilleures décisions qu’un médecin indépendant peut prendre sur le plan fiscal dès lors qu’il dégage plus de 150’000 francs de revenu par année. En effet, les cotisations qu’il pourrait déduire commenceraient à dépasser celles du 3e pilier lié d’une personne non affiliée à une caisse de pension. Mais, à partir de ce constat, quel partenaire choisir ?

Avec ou sans personnel

Il existe plusieurs possibilités, à commencer par les caisses de pension fondées par des associations professionnelles médicales, comme PAT, Aromed ou Asmac, ou encore la CIEPP, qui est ouverte aux indépendants de tous horizons. Le médecin indépendant qui emploie du personnel pourrait également s’affilier dans leur caisse de pension, qui peut être une fondation collective d’une compagnie d’assurance vie. « Mais c’est généralement une mauvaise solution, affirme Olivier Laterali, responsable de la prévoyance auprès de l’Asmac. Le médecin doit entrer dans le même plan que son personnel, sans pouvoir l’adapter à sa situation et à ses désirs. Alors qu’en s’affiliant à une caisse d’association professionnelle proposant une large palette de plans, il pourrait choisir celui qui lui correspondrait le mieux, tant du point de vue de sa carrière qu’au niveau personnel. »

Palette complète

La souplesse et la multiplicité de plans pro- posés par une institution de prévoyance ne suffisent cependant pas à faire son choix. L’état de santé de la caisse, qui est synthétisé par le degré de couverture, doit également être examiné. Mais ce critère doit être tempéré par le taux technique appliqué par la caisse. On rappellera qu’il s’agit d’une projection sur le taux de rendement que l’institution de pré- voyance pense pouvoir dégager sur le long terme. On comprend aisément que le degré de couverture sera d’autant plus grand que le taux technique est élevé.

La comparaison des caisses entre elles est rendue particulièrement difficile par la multiplicité des paramètres à prendre en compte. « Par exemple, explique Olivier Laterali, si l’Asmac se montre meilleure sur certains points, comme le rendement versé sur les comptes de nos assurés (3,75 % l’année dernière), notre taux de conversion de 5 % est nettement inférieur à celui de la CIEPP, qui affiche encore plus de 6%. Pour un médecin de plus de 55 ans qui veut uniquement prendre une rente, c’est un argument individuel très important ».

Ce taux très élevé de la CIEPP constitue d’ailleurs une interrogation chez ses concurrents. Son directeur, Fabrice Merle, le justifie : « Le niveau du taux de conversion de la CIEPP restera toujours supérieur à nos pairs. Il est en totale adéquation avec nos engagements futurs calculés sur le très long terme, grâce à notre modèle de prévoyance qui permet de dégager des rendements plus élevés sur les marchés financiers et de verser ainsi des meilleures prestations ».

Couverture du risque de longévité

De son côté, Patrick Féral, président d’Aromed, explique le choix radical qui a été fait dans cette caisse de pension de renoncer à couvrir le risque de longévité : « Chez Aromed, il n’y a pas de solidarité intergénérationnelle et donc pas de réserves pour des rentes de vieillesse. Chacun prend donc son capital et le gère comme il le souhaite ». Toutefois, les affiliés auprès de cette institution de prévoyance peuvent tout de même bénéficier de rentes viagères privées, avec ou sans restitution de capital, grâce à un accord avec Retraites Populaires, qui propose «des taux de rentes améliorés».

Pour défendre son modèle, Patrick Féral met en avant le coût de financement du risque de longévité : «Il faut savoir qui le paie et au détriment de qui. En fait, cela va être ponctionné sur le rendement des capitaux. On a ainsi pu verser un rendement moyen de 2,54 % au cours des dix dernières années, soit nettement plus que certains de nos principaux concurrents.»

Plan premier

D’une manière plus tranchée encore, d’autres intervenants sur le marché pro- posent la solution dite de plan premier, qui permet aux salaires ou revenus supérieurs à 126’900 francs par année d’être gérés de manière individuelle dans le cadre de la pré- voyance professionnelle. En d’autres termes, comme l’explique Eric del Marmol, conseiller financier auprès de la fiduciaire Gespower, « l’assuré place son épargne dans un organisme bancaire sous sa propre responsabilité, c’est-à-dire que s’il profite de la totalité des rendements de ses placements, il doit aussi en assumer les pertes éventuelles ».

Pour étayer son argumentation, l’expert met en avant la faiblesse des rendements versés aux assurés des caisses de pension « qui sont jusqu’à deux points de pourcentage inférieurs en moyenne au rendement dégagé sur le marché, et le manque de transparence, notamment en matière de frais ».