Même si les banques ne sont guère pressées de se faire rembourser – tout au plus la Finma demande à ce que la dette hypothécaire soit amortie de manière à ce qu’elle ne représente plus que deux tiers de la valeur de nantissement sur une durée de 20 ans –, il faut tout de même se décider sur la méthode: amortissement direct ou indirect.

Par direct, on entend que le remboursement est effectué graduellement au prêteur, alors que, dans l’amortissement indirect, les montants à payer sont versés sur un compte séparé. Et ce n’est qu’à l’échéance que le montant à amortir sera versé, en une seule fois. L’amortissement direct paraît plus logique, puisqu’il permet au propriétaire de diminuer progressivement les coûts du logement au fur et à mesure qu’il s’avance vers l’âge de la retraite. Mais c’est par là même son inconvénient, car la réduction des intérêts fait également diminuer les déductions fiscales qui leur sont liées.

L’amortissement indirect va ainsi permettre de maintenir la même charge d’impôts, et donc de déductions fiscales, jusqu’à l’amortissement groupé. En outre, lorsqu’il est effectué avec un produit de troisième pilier lié, les versements qui s’accumulent bénéficient des exonérations annuelles sur le revenu associées à ce statut juridique, c’est-à-dire 6739 francs pour une personne affiliée à une caisse de pension ou jusqu’à 20% du revenu AVS, mais au maximum 33 696 francs, pour un indépendant non assuré auprès du deuxième pilier.

Si l’amortissement indirect s’impose pour les hauts revenus, à fort potentiel de déductions fiscales, encore faut-il se déterminer sur le type de produit de troisième pilier lié qui va lui être associé: produit bancaire ou assurance vie? La réponse à cette question va dépendre des besoins en couverture de risque. Par exemple, si le souscripteur est mal couvert contre le risque invalidité et en cas de décès, l’assurance vie peut prendre tout son sens. En revanche, si l’emprunteur est par ailleurs bien protégé, par exemple via une caisse de pension généreuse, il est alors inutile de procéder à une telle dépense, qui ferait double emploi. Il faudrait plutôt privilégier le produit bancaire. A noter que même celui ou celle qui aurait besoin d’autres couvertures pourrait les souscrire par ailleurs, sans les combiner dans une seule assurance, dite justement assurance mixte.

Mais la sélection est encore loin d’être terminée, que l’on souscrive un troisième pilier lié sous forme d’assurance vie ou de compte bancaire, car il faut choisir le risque auquel on est prêt à s’exposer. Si l’on amortit au rythme imposé par la Finma, c’est-à-dire un amortissement partiel sur 20 ans, cela correspond à l’horizon de placement de l’emprunteur. «Pourquoi ne pas profiter de cette longue période pour entrer sur des produits tels que des fonds de placement, contenant par exemple jusqu’à 40% d’actions?» demande Albert Gallegos, responsable conseil patrimonial et prévoyance de la Banque Cantonale de Genève.

L’intérêt de l’opération sera d’autant plus intéressant que l’emprunteur paie des impôts élevés. En effet, on peut rappeler que l’impôt est progressif, c’est-à-dire que le revenu est découpé en tranches successives imposées à des taux toujours plus hauts, jusqu’à un maximum. Aussi les sommes qui ne sont pas remboursées directement coûteront à l’emprunteur d’autant moins cher qu’elles bénéficieront de déductions fiscales élevées.
Pour illustrer notre propos, prenons l’exemple que nous présente Albert Gallegos. Supposons que vous dégagez un revenu élevé, et que vous êtes soumis à un taux marginal d’imposition de 34,8% – en d’autres termes, sur 100 francs de revenus supplémentaires, vous payez 34,80 francs d’impôt. Imaginons également que vous avez contracté un emprunt de 850 000 francs, au taux d’intérêt de 2,4%, soit 20 400 francs par an. Si vous procédez à un amortissement indirect, vous bénéficiez, d’une part, de la déduction maximale liée à votre versement; d’autre part, vous profitez de la déduction des intérêts hypothécaires de votre revenu imposable.

Si l’on veut savoir ce que coûtent vraiment les intérêts hypothécaires après déduction fiscale, il faut tout d’abord calculer le montant de l’économie fiscale ainsi réalisée, en multipliant les intérêts hypothécaires par le taux marginal d’imposition, soit 7099 francs (= 20 400 francs x 34,8%). Au total, les intérêts hypothécaires effectifs ne coûteront que 13 301 francs (= 20 400 francs – 7099 francs). Le taux effectif n’est donc pas de 2,4%, mais de 1,56% (= 13 301 francs / 850 000 francs). «Il ne sera donc pas difficile de trouver un véhicule de placement relativement peu risqué dépassant ce rendement attendu», conclut Albert Gallegos.

Reprenons le même cas de figure, en supposant cette fois que vous êtes très sensible à l’évolution des marchés financiers: vous ne désirez en aucun cas prendre de risque dans le cadre d’un remboursement indirect et vous vous cantonnez sur un compte d’épargne. Dans ce cas, la situation se présente différemment: vous allez très certainement payer plus d’intérêt débiteur, même défiscalisé, que ce que va dégager votre compte. Par exemple, si le compte produit 2% d’intérêts, son rendement après impôt tombera à 1,3%, contre 1,56% d’intérêts débiteurs. Dans ce cas, vous auriez avantage à profiter de la possibilité de combiner amortissement direct et indirect, en procédant à des amortissements directs tous les cinq ans. De cette manière, vous pourriez continuer à profiter des avantages des déductions fiscales annuelles du troisième pilier lié, tout en réduisant graduellement votre charge d’intérêt net.

* Journaliste économique indépendant